Les grains de pollen et spores fossiles conservés dans les sédiments permettent de déterminer les variations des paléoclimats à differentes échelles de temps. Couramment utilisés pour les quelques milliers ou dizaines de milliers d'années de l'ère quaternaire avec une grande précision, ils donnent aussi des indications, dans certains cas, sur l'évolution du climat à l'ère tertiaire.

Au sud de l'estuaire de la Loire, sur les deux rivages de la baie de Bourgneuf, affleurent des sapropèles riches en pollen et autres microfossiles, à la Bernerie-en-retz et à Noirmoutier. Si les premiers sont maintenant masqués par un mur de soutènement, les seconds sont toujours visibles.

Les sapropèles de l'anse rouge

à Noirmoutier

Au pied de la falaise couronnée par les pittoresques grès du bois de la chaise, interstratifiés dans des sables argileux, les sapropèles sont facilement accessibles en dehors des hautes eaux des grandes marées, dans la partie sud de l'anse. Leur épaisseur d'une soixantaine de cm permet de nombreux prélèvements à différents niveaux mais qui n'ont pas besoin d'être très volumineux.

Un sapropèle (du grec sapros : pourri et pêlos : argile) est une vase riche en matière organique de couleur noire

 

Isolement des microfossiles et observation microscopique

Il importe avant tout, comme pour les autres sédiments riches en matière organique, d'éliminer celle-ci pour bien observer les microfossiles et de se séparer des particules minérales.

L'eau oxygénée, la soude ou la potasse oxydent efficacement la première ; les sapropèles ont l'avantage de pouvoir être facilement désagrégés et différents essais ont montré qu'une ébullition de 5 ou 10 minutes dans 100mL de potasse a 10% d'une vingtaine de grammes de sédiments soigneusement émiettés suffit à bien dégager les microfossiles. Pour se débarrasser de la partie minérale, les spécialistes ont recours a un traitement à l'acide fluorhydrique; au lycée, l'emploi d'un produit aussi dangereux est exclu. Une simple décantation de quelques heures suffit cependant, à les laisser déposer au fond du becher sous la forme d'un important culot grisatre, tandis que l'essentiel des spores et des pollens (certains restent évidemment piégés dans le sédiment) mêlés à differents fragments végétaux constitue à sa surface une très mince pellicule.

Apres avoir éliminé la plus grande partie du surnageant brun foncé contenant la matière organique en solution, des prélèvements à la pipette Pasteur, en très petite quantité, dans la pellicule superficielle permet une observation aisée de grains de pollen, spores et autres restes organiques, au grossissement de 1000 fois.

Si cette méthode est facile à mettre en oeuvre dans nos établissements elle a l'inconvénient de ne pas fournir les microfossiles à l'état parfaitement isolé ; la pipette aspire inévitablement une petite quantité de particules minérales mais un peu d'eau ou, mieux, de glycérine dilue la petite goutte prélevée pour en dissocier suffisamment les constituants et rendre très bien visibles les grains de pollen, assez nombreux pour une étude qui n'est que qualitative. Il importe cependant, dans ces conditions, de préparer plusieurs tubes pour avoir un apercu suffisant de la diversité des espèces présentes.

Les espèces présentes et leur intérêt pour la reconstitution du milieu, de la flore et du paléoclimat

Ces sédiments sont d'une grande richesse en microfossiles. L'identification des espèces se heurte cependant à un problème lié à leur ancienneté : comment être sûr que tel pollen semblable à celui d'une espèce actuelle appartient bien à celle-ci ? Un nom spécifique a donc été donné à chaque pollen ou spore sur des critères purement morphologiques : la taille et la forme des grains bien sûr (ronde, ovale ou anguleuse) mais surtout les caractéristiques des zones germinales (pores ou sillons) et l'ornementation de l'enveloppe externe parfaitement conservée, l'exine, marquée de crêtes, de tubercules, de pointes, parfois sur deux niveaux et que permettent de bien observer les différents grossissements du microscope électronique à balayage. Si, fréquemment, son appartenance à une espèce actuelle est hasardeuse voire impossible, il est heureusement des cas dans lesquels la similitude ne laisse pas de doute ou, au moins, permet son rattachement à une famille végétale connue.

La détermination d'associations sporopolliniques caractéristiques fournit alors une image de la végétation passée du lieu, mais aussi de la paléogéographie et finalement du paléoclimat. Une étude quantitative n'étant pas envisageable en TP, l'existence d'espèces indicatrices à l'écologie bien définie nous est particulièrement utile. L'identification des types de pollen qu'elles ont produits est relativement facile de même que celle des grands groupes de végétaux présents. Ce site présente d'autre part l'intéret de receler des kystes de dinobontes (dinophycées) plus difficilement observables.

Comparez les microfossiles de votre préparation à ceux photographiés ci-après et, grâce au tableau, rapportez-les aux grands groupes de végétaux ; identifiez quelques espèces .

 

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Groupes végétaux
Espèces fossiles
Genres et familles actuelles apparentés
SPORES

fougères

Spores de grande taille, trilètes : trois cicatrices en croix au pôle proximal

Cicatricosisporites dorogensis

ornementation en bandelettes

(54 µm)

Mohria

Anomia

genres africains

POLLEN

gymnospermes

grains a 2 ballonnets dont le mode d'insertion sur le grain est caractéristique

Pityosporites microalatus

insertion supérieure à la demi-sphère

Cathaya

conifère endémique

de la Chine

(découvert en 1955)

angiospermes

nomenclature en rapport direct avec

les caractères et le nombre des zones germinatives :

trois pores : triporé

un sillon : monocolpé

trois sillons : tricolpé

vue polaire - vue équatoriale

quatre : tétracolpé

les caractères de l'exine :

" épines " et sillon circulaire : Nypa

lisse à sillons peu visibles :

sapotacées

Quelques grains de pollen parmi les plus fréquents

Palmiers:

Spinizonocolpites prominatus (le genre = 4% du pollen inventorié) (56µm)

 

Monocolpopollenites tranquillus

 

Sapotacées : Tetracolporopollenites megadolium (47µm)

 

Myrtacées :

Cupanieïdites eucalyptoides

Appartenance inconnue:

Pompeckjioideapollenites subhercynicus (20.4µm)

--Pollen moins fréquent --

Fagacées :

Psilatricolporites cingulum

 

Tiliacées :

Intratriporopollenites microreticulatus (42µm)

 

 

Nypa : petit palmier des mangroves de l'Asie du sud et du nord-est de l'Australie

 

 

arbres et arbustes à latex, tropicaux et subtropicaux ex : arbre de fer (Chrysophyllum)

 

arbres de climat tempéré-chaud a subtropical ex : Eucalyptus

 

 

 

 

ex : châtaignier (Castanea)

arbre des forêts tempérées

 

tilleul (Tilia)

arbre des forêts tempérées

 

 

 

Phoenix : grands palmiers tropicaux et subtropicaux

 

 

 

 

KYSTES

Dinobiontes

(= Dinophycées)

Wetzeliella Deflandrea

espèces surtout marines

ex : Dinophysis

 

Quelques microfossiles parmi les 110 repertories

Photos : Marie-Francoise Ollivier-Pierre

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5 (deux angles d'observation)
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Age des sapropèles

Le spectre pollinique de ce site le différencie nettement de ceux de la fin du crétacé. Par ailleurs plusieurs espèces sont caractéristiques du tertiaire ancien : Cicatricosisporites dorogensis, Monocolpopollenites tranquillus, etc. et certaines comme Pompeckjoideapollenites subhercynicus sont plus précisement de l'éocene inférieur. L'âge des sapropèles est ilerdien supérieur, partie inférieure de l'étage yprésien ( il y a un peu plus de 50 millions d'années).

Le paléoenvironnement et le climat de la baie de Bourgneuf au début de l'éocene

A partir de vos observations et des données du tableau précédent reconstituez l 'aspect probable de la végétation de cette région et son climat.

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